Lycée français de
Jérusalem
La classe de français
Site animé par Marlène Stuczynski
Lettres de condamnés
2nde
Dans le cadre de l'étude du Dernier jour d'un condamné de Victor Hugo, et en s'inspirant de la lettre de Missak Manouchian adressée à Mélinée, Les élèves de la classe de 2nde ont imaginé la lettre qu'un condamné pourrait écrire à l'un de ses proches, juste avant de mourir.
11 Janvier 2021
À qui lira cette lettre, peu importe qui ce sera, je vous en prie, comprenez moi et lisez jusqu'à la fin, même en connaissance de mon crime.
Je suis condamnée à mort. Je me suis faite à l'idée. Rien ne peut arrêter le destin, et le mien est de mourir. J'ai commis un crime, et je l'admet, mais s'il vous plaît, ne le tenez pas contre moi. Je veux juste pouvoir exprimer mes derniers sentiments.
Mon nom ? Je ne le connais même plus. Importe-t-il ? Plus personne ne me voit comme une humaine. Pour tous, je suis juste le crime que j'ai commis.
J'ai dit m'être faite à l'idée, c'est vrai, mais je ne veux pas. J'ai assisté à des exécutions. Je ressens toute la douleur, toute la peur, tout le regret de ceux avant moi. Toutes les exécutions se font à 16h, le vendredi. Je ne sais pas quelle heure il est actuellement. Je ne suis pas autorisée à le savoir.
À vrai dire, je ne pense pas que j'ai le droit d'écrire cette lettre, car jamais mes gardiens n'ont répondu à mes demandes d'avoir du papier. Mon dernier crime aura été de voler le papier et le crayon avec lequel j'écris. Je sais que plus rien ne peut m'arriver. Après tout, je vais mourir. Peut-être ce petit vol sera le crime qui m'aura tué, pour les générations futures ?
Honnêtement, je ne sais quoi écrire. J'ai tant de pensées tourbillonnant dans mon esprit, mais je ne peux en écrire une seule.
J'ai regardé par la fenêtre de ma cellule. Elle est petite, pour que je ne puisse pas m'échapper, mais donne sur une branche d'arbre. J'ai observé les œufs éclore, et aujourd'hui, les oisillons ont volé pour la première fois. J'aimerais qu'il volent loin, loin de cette dernière demeure, loin de cette humanité meurtrière.
J'aimerais pouvoir m'envoler, moi aussi. J'imagine que, dans un sens, ça ne va pas tarder. Parfois, je me surprends à rêver d'une deuxième chance de vivre qui m'est offerte, Si cela pouvait m'arriver, j'aimerais être un oiseau.
Grâce à la lumière du soleil, je peux deviner qu'il sera bientôt 15h. Ils viendront me chercher à cette heure-ci, pour me donner mon dernier repas. Je n'ai rien voulu. Je n'ai pas faim.
Il semble que ces deux mois tout aussi interminables que rapides m'ont appris une chose : deviner l'heure grâce au soleil. Je les entends s'activer et passer en courant devant ma cellule. Ils se préparent, et ils la préparent, elle, cette lame immense et tachée de sang.
Le verrou de ma porte tourne. Je leur ai demandé, à travers la porte, de me laisser écrire ces dernières lignes, et ils m'ont laissé faire. Mon vol leur importe peu.
Je suis en paix avec moi-même. Je ne regrette pas non plus mon crime. Tous ces gens affamés, ils avaient besoin de moi. Je ne pouvais pas les laisser mourir de cette façon.
Si j'avais un regret ?
Ce ne serait que de mourir le jour de mon vingtième anniversaire.
Par Eva Métézeau, 2nde, 2021-2022
Chère Siba,
Dans quelques heures, je serai loin dans ma grève. A 20 heures ce soir, je serai tué par injection du poison ‘’Pancuronium bromide’’.
Je ne sais pas quoi écrire, je regrette profondément d’avoir fait ce que j’ai fait, de ne pas pouvoir voir notre fille grandir, de ne pas pouvoir être là pour toi quand tu auras besoin de moi le plus.
Je t’assure qu’il n’était pas prévu que je tue autant de monde. J’assume qu’il y ait des conséquences sévères à mes actions, mais aucune de ces actions n'a été faites dans le but de te nuire. Les familles des victimes que j’ai tuées doivent être dédommagées. Je sais que notre état financier est dur en ce moment, et que ma mort de facilitera pas les choses, mais essaye de faire de ton mieux pour gérer sans moi notre foyer.
Je suis certain que tu voudras me poser cette question: "Pourquoi ai-je fait ce que j’ai fait?"
La réponse est simple : " Pour l’argent".
L’argent, pour donner une meilleure vie à notre enfant, l’argent pour améliorer nos conditions de vie.
Un gardien de cette prison m’a regardé et m’a dit une phrase à laquelle je pense beaucoup, une phrase qui me détruit. ‘’L’argent ne change pas les gens, il ne révèle que leur vrai visage’’. Peut-être étais-je toujours été un criminel, et que je ne le savais simplement pas.
Je suppose qui tu donneras à notre enfant le nom de ‘’Luna’’. C'est ce qui était prévu en tout cas. Quand je elle grandira, promets-moi que tu lui parleras de moi de temps en temps, promets-moi que tu l’aimeras et que tu la protégeras toujours et tout le temps ,n’importe où. Tu lui diras que je l’aime et que je suis avec vous deux en esprit.
Informe aussi ma famille que je les aime et que je voulais offrir un cadeau à ma mère, aller à la pêche avec mon père. Qu’ils ne soient pas tristes, qu’ils continuent à vivre leur vie.
Je suis vraiment désolé, je t’aime beaucoup...
Ton mari, ton camarade de 15 ans.
P.S. Ne montre jamais cette lettre à Luna, je ne veux pas qu’elle lise un jour quel homme horrible j'ai été.
par Ameer Nasrallah, 2nde , 2021-2022
Ma chère Maman,
Je vous écris cette lettre pour que vous soyez la seule personne à laquelle mes derniers mots seront adressés. Je n’ai pas peur de la mort mais la tristesse et le regret s'emparent de mon cœur à l’idée de vous laisser seule. Ne pleurez pas pour moi, mais pleurez et priez pour ceux qui sont innocents, ceux-là ont besoin plus que quiconque de soutien et de prière. Oh ma chère Maman, sachez que je regrette mon acte plus que tout au monde; pourvu que le Bon Dieu me pardonne. Depuis l’annonce de ma sentence de mort, je prie, je prie Dieu pour qu'il m’épargne l’Enfer. Mériterai-je d’aller en Enfer ? Seul le Seigneur pourra en décider.
Nous sommes dans la charrette qui nous conduit Place de Grève. Le soleil lèche les toits d’ardoise, nous allons avoir une belle journée. C’est un des plus beaux levers de soleil de ma vie. Quelle tristesse de savoir que c’est le dernier et que plus jamais nous ne pourrons en profiter. Mes camarades sont cois, personne ne prononce un mot, à vrai dire, on n’en voit pas l’utilité. Chacun préfère se concentrer sur soi dans ses derniers instants. Peut-être ont-ils une femme, des enfants, qui sait ? J’aperçois l’échafaud au centre de la place, ma gorge se serre. Il y a déjà foule. Nous sommes entourés d’une masse de spectateurs qui affluent autour de la charrette et de la place. Pourquoi les gens trouvent-ils tant d’attrait à regarder les autres mourir ? Ce n’est pas un spectacle plaisant, certes nous sommes peut-être des criminels mais j’ai toujours trouvé que la mort était quelque chose d’intime, un moment où l’on se retrouve en tête à tête avec le Seigneur et où se scelle la suite de notre vie. L’échafaud se rapproche de plus en plus, on peut distinguer les visages des gens. La mort est bientôt là, à quelques pas, quelques minutes, les derniers instants de notre vie.
Mon Dieu, comme il est dur de partir ! Je récite à voix basse la prière des morts et ajuste mon accoutrement misérable. La charrette s’arrête, c’est la fin.
Je vous embrasse. Prenez soin de vous ma chère Maman. Je serai toujours avec vous.
Votre fils qui vous aime.
Par Marie Ingrand , 2nde , 2021-2022
Ma chère Jeanne,
Ma chère enfant, je déteste que dans ces circonstances je doive te quitter, malheureusement je n’ai pas le choix: c’est une chose qui m’a été imposée.
Tu es une belle jeune fille, tu es forte, brave, attentionnée et tu es très aimée par les gens autour de toi. Oui, je te quitte mais tu resteras avec tes grands parents, ils t’aiment si fort.
Jeanne, tu es une fille intelligente, je voudrais que tu poursuives tes études. L'année prochaine, tu rentreras au lycée, tu entameras une nouvelle étape de ta vie. Sois heureuse mon enfant et vis ta vie à fond.
Il faut que tu saches que même si je ne suis pas là physiquement, je serai là-haut à veiller sur toi et tu me sentiras près de toi à chaque étape importante de ta vie.
Quand tu te sentiras perdue, regarde juste autour de toi et je serai là.
Reste toujours honnête avec toi-même.
Je t’aime très fort Jeanne,
Ton père.
Par Yasmine Rabah, 2nde, 2021-2022
Ma femme, ma chère chère femme,
Je suis triste de partager avec toi cette nouvelle par lettre et non pas de vive voix, physiquement, à tes côtés, mais ce n’est pas mon choix. Aujourd’hui à minuit, c’est-à-dire dans quelques heures pour moi, je serai pendu avec mes camarades en public.
Je sais que j'aurais dû t’en informer plus tôt mais je ne voulais pas te mettre en danger : je suis Résistant.
Depuis que le régime de Vichy s’est installé, j’étais furieux, je n’étais pas d’accord avec le régime de Vichy, alors je me suis engagé dans la Résistance avec certains de mes camarades de guerre.
Ça fait longtemps que la Gestapo nous chasse sans jamais parvenir à nous attraper. Mais cette fois, elle nous a eus. On s’est fait piéger par un soldat français qui travaillait pour eux.
On nous a prévenu : d'ici ce soir, on sera tous pendus en public, afin de "donner l'exemple".
Tu ne sais pas à quel point je suis triste. Je sais que tu ne t’attendais pas à cela mais je suis vraiment désolé. C’est pour cela que je veux que tu restes forte et que tu trouves un nouveau mari, qui t'aimera autant que moi.
Sous notre lit, tu trouveras une multitude de lettres et de l'argent. J’avais envisagé mon arrestation, je m’étais préparé à cette éventualité. Juste regarde
Tu vas me manquer, je t’aime ma chérie!
Reste forte et courageuse. Adieu, ton amour, ton mari.
Dubois Jean.
Par Omar Kurdieh, 2nde, 2021-2022